Grand Prix Littéraire du Golf 2021

- Jouer au golf

Grand Prix Littéraire du Golf 2021, 3ème prix

A l’automne dernier, sous la houlette de notre journaliste Patrick Bedier, Golfstars lui répondait immédiatement OUI pour l’accompagner dans son projet de création inédit et innovant d’un concours littéraire basé sur un concept simple : rédiger une courte nouvelle à la thématique golf, de 500 à 1 000 mots ( 6 000 signes espaces compris maximum), et avoir un titre. Elle devait être originale, et ne devait pas avoir été publiée auparavant.

45 Nouvelles retenues plus tard et à notre plus grande joie, 3 prix étaient décernés lors d’un cocktail chez Golf en Ville à Saint-Cloud (92), avec en prime la gentillesse et l’hospitalité devenue légendaire de Carole Batlouni et son mari. Derrière les noms et les intitulés, nous avons découvert que nos choix pour les meilleurs textes s’étaient portés sur des auteurs confirmés, férus de littérature et de golf.

Découvrez et passez un agréable moment de lecture golfique avec la publication de la Nouvelle primée (Troisième Prix)

Pierre Chaudesaygues

a propos de L’auteur : PIERRE CHAUDESAYGUES

Directeur des chaînes Canal+ Sport à l’International, Pierre CHAUDESAYGUES a toujours été amené dans son métier de journaliste à raconter des histoires au travers de nombreuses émissions et de différentes productions pour la télévision. Passionné de la petite balle blanche, il a été l’un des artisans de la création de la chaîne GOLF+ (Groupe Canal+).

Sa nouvelle : « JE NE SUIS PAS UNE CATIN »

Voilà plus de quatre heures que je passais de main en main. Sans ménagement, mais avec toujours beaucoup de bienveillance. Quatre heures tantôt à me faire claquer les fesses, traiter de tous les noms d’oiseaux possibles, tantôt à me faire nettoyer, câliner, embrasser. Il soufflait le chaud et le froid en permanence et j’avoue que j’avais du mal à savoir ce qu’il voulait, vraiment, si ce n’est que je sois docile avec lui. Quelle drôle d’idée. Comme toutes mes copines, je n’avais pas été préparée à ça.

Au départ ce matin, les choses s’annonçaient pourtant sous les meilleurs auspices. Cela m’avait vraiment fait bonne impression. Une serviette toute neuve et très douce m’avait caressée de la tête aux pieds. On avait même pris le soin de me baigner dans de l’eau chaude. Puis pendant que je me laissais aller entre des doigts experts – le bain chaud ça vous détend – j’avais senti une sensation désagréable dans le dos. Une drôle d’inscription que je ne comprenais pas, mais qui semblait indispensable pour pouvoir entrer dans le panthéon des champions. Je ne suis pas très fan des tatouages. Celui de ma date de naissance me suffisait largement. Il avait été pensé et réfléchi par mes parents et avait une signification. Il validait mon appartenance au gang des ‘’top players’’ et j’en étais très fière. Franchement celui qu’on venait de me faire était loin d’être une œuvre d’art. On aurait pu me demander mon avis. À la limite si on m’avait dessiné un ‘’Modigliani’’ ou un ‘’Picasso’’ j’aurais surement accepté.
Enfin, on m’avait présenté mon maître. Une main ferme, des gestes assurés, précis, je sentais quelqu’un de rassurant sur lequel je pouvais m’appuyer.

On m’avait prévenue : les relations pouvaient être parfois tumultueuses, mais j’étais très excitée à l’idée de le découvrir. Le début de notre histoire était plutôt tranquille. Il me faisait découvrir les différents lieux dans lesquels j’allais travailler. D’abord, un bac à sable où j’avais le sentiment de retomber en enfance. Puis un tapis très soyeux où je pouvais me rouler dans un sens puis dans l’autre. Tout ça ressemblait au paradis. À chaque fois qu’on changeait de lieu, j’avais droit à mon taxi personnel. Un peu sombre, mais très agréable et relativement chaud.

Puis sans prévenir, le ton avait d’un coup changé. Alors que je commençais juste à prendre la mesure de mon nouvel emploi, j’entendis qu’on appelait mon patron d’une voix grave et solennelle. Le tout encouragé par des cris et des ‘’come on’’, ’come on !’’.

Je compris que le show allait commencer. Comme un tremblement de terre, j’eus le sentiment d’être projetée dans les airs comme une poupée de chiffon et de retomber face contre terre à des kilomètres. De vraies montagnes russes. À peine avais-je repris mes esprits que ça recommençait. Et à chaque fois, que le manège s’arrêtait, on me prodiguait de nouveaux soins. Il y avait un peu de répit avec une courte pause sur le tapis où j’avais roulé quelques heures auparavant et c’était reparti, je me retrouvais dans les airs.

J’entendais sa voix qui semblait satisfaite, j’y décelais même un peu de suffisance. Pourtant, il aurait dû le savoir. Je suis issue d’une grande famille. Mon éducation m’avait appris à rester respectueuse en toute circonstance. Et au fil du temps, je sentais qu’on faisait de moins en moins attention à moi. Ça parlait de pentes, de distances, de green, de fairways, mais presque plus de moi. De temps en temps, j’avais droit à un bisou, mais cela se faisait de plus en plus rare. Les quolibets fusaient plus souvent à mon endroit que les compliments. Il aurait dû le savoir pourtant. C’est moi et moi seule qui pouvais décider de son bonheur ou de son malheur.

Combien de mes amies avaient détruit des carrières parce que leur patron ne les avait pas respectées. Combien avaient décidé d’aller se promener dans un bois, des hautes herbes ou même se baigner dans un lac pendant leurs heures de travail.

Nous arrivions au terme de notre collaboration. Il me restait encore un dernier manège à réussir avant d’être enfin libérée. Le tapis vert qui se présentait devant moi serait le dernier. Il était immense et très vallonné. Un terrain de jeu idéal pour monter de quoi j’étais capable. La journée avait été longue. Alors quand le gazon me caressa le dos pour la dernière fois, je me sentis pousser des ailes. Comme dans un dernier sursaut d’orgueil, je m’élançais dans ce toboggan d’incertitudes. Je savais que mon maître me suivait des yeux espérant que je fasse ce qu’il m’avait ordonné. Mais voilà, pour lui j’étais une catin. Il me l’avait si souvent répété tout au long de la journée. Je me devais donc de lui montrer vraiment qui j’étais. À mesure que l’issue se rapprochait, je sentais la bronca monter autour de moi. Ça criait hurlait des ‘’In the Hole !’’ à tout rompre. Je voyais bien que j’étais l’objet de tous les espoirs.

Devant moi se présentait le dernier virage avant de plonger une dernière fois dans l’inconnu. Je devinais à quelques tours de roue le trou noir dans lequel j’étais censé plonger. Ma décision était prise. J’allais tenter l’une des plus belles figures au monde. Les ‘’waouh, nooooon, oh my god !’’ n’auguraient rien de bon pour mon maître. Je devinais qu’il allait me traiter une dernière fois de catin. Je venais de réussir, un magnifique 360° pour me percher en suspension au bord du précipice. Ma jouissance était à son paroxysme.

Je tenais ma vengeance. Il aurait dû me respecter.

 

Photo Stéphane COUDOUX

Stéphane COUDOUX

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